«Bienvenue en 2021 !» est l’exclamation qui m’est venue à l’égard de l’Église lorsque ce 11 octobre, “journée nationale du coming out” aux USA, DC Comics nous annonçait que « Jon Kent a trouvé son identité (…) Le nouveau Superman s’affiche comme bisexuel. » Alors que du haut de ses 80 ans, «Superman père» a bercé des générations, voilà que son fils prend un nouveau cap en faisant du rase-motte dans le but de rejoindre les minorités et décaper notre univers en le revêtant des couleurs de l’arc-en-ciel, couleurs symboliques du mouvement LGBTQI+.

Cet article n’a pas pour objectif de couvrir la question d’un mouvement aussi complexe que celui des LGBTQI+, dans lequel il faudrait pour cela, aborder les implications sociologiques, psychologiques et théologiques. Bien qu’étant pasteur, plusieurs de mes connaissances avec qui j’ai du plaisir à passer du temps, ne partagent pas ma foi chrétienne. Certains d’entre eux sont en faveur de bien des formes d’orientations sexuelles. De la même manière qu’ils me respectent et ne me privent pas de leur amitié sous prétexte que je pense différemment, je m’applique à en faire autant et Dieu sait à quel point leur amitié m’est précieuse. Il y a par conséquent, aucune hostilité dans ces lignes envers qui que ce soit, sinon une simple tentative d’articuler intelligiblement ma foi dans la réalité qu’est la nôtre aujourd’hui.

Je serais tenté de dire, comme la très grande majorité, que la version de «Superman fils» ne me parle pas. Toutefois, j’ose dire au contraire, que cette dernière version m’interpelle d’autant plus. Celle-ci me pousse à remettre en question le pourquoi de mes convictions, ma définition de l’acceptation, les fondements de ma compassion, la façon d’exercer ma vocation de chrétien et de pasteur et ma capacité de voir ou pas, l’humanité sur un même pied d’égalité.

Parmi les commentaires lus à la suite du «coming out» du nouveau Superman, les plus virulents provenaient de personnes non-croyantes, n’est-ce pas à la fois surprenant et rassurant ? Il ne serait pas impossible que le fils de Superman soit loin de faire le bonheur de l’ensemble même de la communauté LGBTQI+. D’ailleurs, n’oublions pas qu’il y a autant de types de personnalités et d’individus différents parmi les homosexuels que parmi les hétérosexuels. Si nous gardons cela en mémoire, nous éviterons le piège des clichés et cultiverons ainsi une attitude bienveillante lors de nos interactions.

1. DIABOLISER OU BANALISER ?

Deux enclaves extrêmes sont possibles quant à la question des LGBTQI+. L’une consiste à diaboliser de tels comportements ou à les banaliser de l’autre.

Par «diaboliser», j’entends le fait de classifier cette orientation sexuelle, comme le péché le plus élevé sur l’étagère de nos vices. Cette perception viendrait d’un texte biblique qui associerait l’homosexualité comme étant une abomination (aversion – horreur – répulsion) aux yeux de Dieu.

À propos du couple hétérosexuel, Jésus s’est prononcé de vive voix sur la question du divorce et du remariage, alors qu’il n’a pas exprimé le moindre mot au sujet des attirances de deux personnes du même sexe. L’homosexualité étant une pratique courante dans l’empire gréco-romain, ce constat est quelque peu troublant lorsque l’on considère à quel point nous pouvons être plus radicaux dans nos propos que Jésus ne l’a jamais été.

Par «banaliser», j’entends le fait de minimiser ou de normaliser cette orientation comme étant naturelle, alors que bien des athées reconnaissent là, une pratique contre-nature. Alors, devons-nous diaboliser ou banaliser le sujet ? Ni l’un ni l’autre !

La définition de ce que nous nommons «péché» s’avère indispensable pour une prise de position plus juste. «Hamartia» est l’un des termes grecs pour décrire «le péché», à l’image de la flèche perdue dans la nature, faute d’avoir atteint son objectif, il signifie le fait de «manquer la cible». Pécher, c’est passer à côté de la raison pour laquelle nous avons été créés soit, glorifier Dieu. Tout péché est un déshonneur envers Dieu et une offense pour laquelle il y a des conséquences. C’est là que Jésus intervient en se sacrifiant, payant de sa vie à la place de la nôtre. Il n’a pas été crucifié que pour une certaine catégorie de péchés. Dans cette optique, nous ne sommes pas en mesure de «diaboliser» une offense plus qu’une autre.

Il existe une douzaine de péchés faisant l’objet d’une abomination devant Dieu. Dans cette liste figure le favoritisme d’une personne au détriment d’une autre ainsi que des pensées hautaines. De prime à bord, ceux-ci nous sembleraient moins abominables que certaines inclinaisons sexuelles, et pourtant… Ainsi,

«banaliser» le péché  quel  qu’il soit  est impossible.  Ne  pouvant ni  «diaboliser» ni

«banaliser» un quelconque comportement ou pensées offensantes envers Dieu, la vraie question à se poser est : le péché est-il quelque chose de grave, oui ou non ? Voir le Fils de Dieu agoniser sur des poutres et maintenu par des clous est-ce suffisamment sérieux et grave, selon toi ? Jésus fut sur la croix en plein centre de la cible que nous manquons encore et encore, accomplissant ainsi la volonté de son Père, bien qu’innocent. Un tel amour ne peut que m’inciter à me repentir de mes propres péchés !

2. INDIFFÉRENT OU CHOQUÉ ?

Bon d’accord, j’avoue que cette nouvelle m’a choqué. Ce n’est pas tant la nouvelle orientation sexuelle de Superman qui m’a dérangé, sinon que le fait que cette dernière soit associée à l’un de mes héros d’enfance. À ce jour, il est le 26ème et dernier «super héros» à avoir rejoint les rangs du LGBTQUI+ de DC Comics. Vraiment, avais-je raison d’être surpris ? Oui, me répondras-tu peut-être en m’haranguant : «Mais tu es chrétien, pasteur de surcroît, comment ne pas être choqué ?!». En tant que chrétiens, ne devrions-nous pas être les moins déstabilisés devant de telles annonces ? Après tout, pouvais-je m’attendre à autre chose de la part de l’industrie d’Hollywood, puisque malgré l’illusion phonétique de «Holly…» elle n’a rien de «Holy/saint». Parfois (trop souvent dirais-je), nous nous comportons comme des pompiers qui seraient déstabilisés de sentir la chair brûlée en pénétrant dans une pièce en flamme, comme des plongeurs étonnés que leur survie dépende de l’oxygène, ou des chirurgiens qui s’évanouiraient à la vue du sang. Avons-nous vraiment assimilé que ce monde n’est pas celui de ceux qui placent leur espérance en Christ ? Que l’Église est appelée à faire office de pompier dans ce «Kosmos/Monde» ensanglanté, en pleine asphyxie ?

Toutefois, si je n’ai pas à être choqué de ce qui se lève contre les valeurs de Christ, je ne peux me replier dans l’indifférence. Il s’agirait là d’un autre «hamartia» grave ! En plus des raisons exprimées sous la question «diaboliser ou banaliser», comment être indifférent devant un si grand nombre de personnes, réunies sous la bannière des LGBTQI+, souffrant de violences en tous genres de la part de leurs familles, de leurs collègues et de ceux qu’il pensaient être leurs amis jusqu’à ce qu’ils fassent leur « coming out » ?

Comment sombrer dans l’indifférence devant un voisin qui décide de mettre fin à de tels rejets, en n’ayant plus d’autre choix que de mettre un terme à sa vie ?! Et je ne parle même pas de ceux qui, sans cette pression, affrontent jour après jour des crises psychologiques indescriptibles.

Allez, je vais poser la question qui tue : «– Si comme chrétien, ton fils ou ta fille, t’annonce demain qu’il ou elle, est attiré.e par des personnes de même sexe (AMS), vas-tu cesser de l’aimer, vas-tu lui fermer la porte de la maison dans laquelle il/elle a grandi, vas-tu l’exclure des fêtes de Noël, anniversaires etc ?»

Si oui, alors qu’as-tu de si différent de lui/elle aux yeux du Dieu de la Bible ? Si Jésus mangeait avec des étrangers qui pensaient et vivaient, de loin pas comme lui, sous quel prétexte ton propre enfant ne mériterait plus ta «trop-sainte» personne ?

Pour ma part, j’aspire à être comme Jésus, ni choqué ni indifférent, mais concerné pour les gens, par leur histoire de vie et me comporter comme Jésus, avec grâce et vérité, sans que l’une ne soit présente sans l’autre.

3. REJETER OU APPROUVER ?

Si tu as persévéré dans ta lecture jusqu’à cette page-ci, alors bravo ! Arrivé à la dernière partie de cette rédaction, il n’y a qu’un pas pour que tu risques de penser que j’approuve tout ce qui englobe le mouvement LGBTQI+. Si tel est le cas, peut- être devrais-tu relire le 1er chapitre «Diaboliser ou banaliser ?».

Bien que dans le précédent chapitre, je précise que je ne vois pas comment justifier le rejet d’un proche qui m’avouerait son attirance envers des personnes de même sexe, cela ne signifie pas pour autant que j’approuve cette orientation, prise dans cette dimension aussi sacrée que celle de la sexualité. Du coup, cela fait-il de moi un homophobe ou un radical extrême ? Non, absolument pas !

Entre le rejet et l’approbation, il est tout à fait possible de simplement «accueillir l’autre» avec considération tout en se respectant soi-même, c’est à dire sans se renier. C’est là, dans cette atmosphère d’accueil, qu’il est possible de partager des opinions, des convictions, des ressentis et des récits personnels et ce, sans la peur de se compromettre ni la hargne de convaincre. Parce que s’il y a une chose dont le chrétien devrait être conscient, c’est que seul le Saint-Esprit est en mesure de nous convaincre de l’état réel de nos coeurs. C’est dans cet esprit d’accueil que Jésus est en mesure de nous aimer en tant qu’individus tout en désapprouvant nos comportements injustes et offensants.

Dans cette attitude d’accueil, mon prochain aura plus de chances de découvrir, que les bras du Fils de Dieu ont été cloués sur la croix afin d’offrir au «fils de Superman» un envol d’une toute autre envergure, d’une toute autre nature, car Jésus n’est pas venu rendre notre monde meilleur, mais pour nous greffer un nouveau coeur, une nouvelle nature, un changement tel que la métamorphose aussi insoupçonnée que la chenille rampante devenue un papillon.

Une dernière chose. Si l’idée d’accueillir te rebute, alors autant mettre fin aux amitiés hétérosexuelles en proie à la pornographie et Dieu sait, combien c’est un fléau majeur dans notre génération. Peut-être en es-tu victime ? Tu ne voudrais sûrement pas perdre tes amis du jour au lendemain, sous prétexte que ce péché est plus grave que d’autres ? Vois-tu, peu importe qui, entre les «Jon Kent» de notre société et moi, avons une poutre ou une paille dans l’oeil, parce que ni l’un ni l’autre avec sa poutre ou sa paille, ne sommes en mesure d’avoir une vision claire et complète, sans l’aide salutaire de Jésus-Christ, venu déchirer le voile de nos aveuglements respectifs !

Ensemble, louons Jésus pour sa grâce et sa vérité, Pst Phil